Le problĂšme de la dĂ©mocratisation des politiques publiques fait lâobjet dâune abondante littĂ©rature scientifique. Une question centrale se dĂ©gage nettement : lâintervention de lâĂtat suppose-t-elle lâabsence de participation des acteurs non Ă©tatiques ?
Deux concepts sont mobilisĂ©s dans les Ă©tudes, celui de co-production et celui plus rĂ©cent de co-construction. Ce chapitre entend dĂ©montrer la valeur heuristique de la clarification de leur usage respectif et de leur distinction. En effet souvent pris lâun pour lâautre il apparait des diffĂ©rences qui mĂ©ritent dâĂȘtre soulignĂ©es.
Le premier moment de la discussion sera dâordre thĂ©orique. La co-production des services publics est un thĂšme prĂ©sent dans les recherches depuis plus de trente ans. Il renvoie Ă une possible dĂ©mocratisation de lâorganisation de la production des services aux personnes ou des services de proximitĂ©. Cette dĂ©mocratisation peut surgir de plusieurs maniĂšres : Ă partir de la participation des usagers Ă la production des services ou de celle des organisations de la sociĂ©tĂ© civile dans la gestion et la prestation des services ou dans la mise en Ćuvre des politiques publiques. Dans ces diffĂ©rents scĂ©narios la co-production se rĂ©fĂšre Ă la dimension organisationnelle des services dâintĂ©rĂȘt public et des politiques publiques.
Le concept de co-construction examinĂ© ensuite fait rĂ©fĂ©rence Ă des dimensions non pas organisationnelles mais plutĂŽt institutionnelles, dans le sens de la fixation des orientations gĂ©nĂ©rales et des Ă©lĂ©ments fondateurs de la politique. Ă la diffĂ©rence de la co-production, la co-construction surgit dĂšs la conception des politiques publiques et pas seulement lors de leur mise en Ćuvre. En nous appuyant sur les contributions thĂ©oriques de plusieurs auteurs, il sâagit de baliser le concept en identifiant diverses configurations auxquelles il peut ĂȘtre associĂ©.
Le second moment de la discussion entend mettre Ă lâĂ©preuve cette distinction conceptuelle. Pour ce faire nous mobiliserons un ensemble de recherches empiriques menĂ©es en AmĂ©rique du Nord (Canada â QuĂ©bec) et en AmĂ©rique du Sud (BrĂ©sil et Chili). Ainsi en Ă©tudiant certaines formes de co-construction nous serons amenĂ© Ă souligner les limites des politiques publiques purement Ă©tatistes et les occasions dâapprofondissement de la dĂ©mocratie suscitĂ©es par la participation des acteurs de la sociĂ©tĂ© civile, dans la formulation des problĂšmes publics et dans lâĂ©laboration des rĂ©ponses publiques.